Des empereurs, des Dieux, et Noël Coypel

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Néron au milieu d'un festin ordonnant la mort d'Agrippine 1700-1702 Huile sur toile Grenoble, musée de Grenoble, dépôt du musée du Louvre, MG 572
Néron au milieu d'un festin ordonnant la mort d'Agrippine 1700-1702 Huile sur toile Grenoble, musée de Grenoble, dépôt du musée du Louvre, MG 572 (© Grenoble, Ville de Grenoble / musée de Grenoble – J.-L Lacroix)

Éclairée par les rayons du Roi Soleil, l’œuvre de Noël Coypel (1628-1707) nous invite à une promenade au cœur du Grand Siècle, des salons du château de Versailles au sommet de l’Olympe. Le musée des beaux-arts consacre la première rétrospective à ce « peintre du Roi », artiste majeur du XVIIe siècle qui réalisa jadis, le plafond de la Grand’Chambre du Parlement de Bretagne.

Louis XIV, Néron, Hercule, Appolon, Vénus… En poussant les portes de l’exposition « Noël Coypel, peintre du roi », vous tutoierez des yeux le sommet du pouvoir, forcément éblouissant. Le sommet de l’Olympe, aussi. Le sommet de l’art, enfin.

« Nous nous trouvons face à l’un des grands peintres du XVIIe siècle », confirme Guillaume Kazerouni, responsable des collections anciennes du musée des Beaux-Arts de Rennes depuis 2013.

Soient une centaine d’œuvres nous invitant à découvrir un artiste à la longévité exceptionnelle, qui participa jadis aux chantiers royaux les plus prestigieux.

« Son œuvre couvre tout le règne de Louis XIV », nous éclaire le conservateur. Pourtant, la lumière du Roi Soleil n’a pas empêché l’artiste de tomber dans un oubli relatif, jusqu’à un récent retour de flamme. « J’étais en terminale en 1994, et il a fallu l’incendie du Parlement de Bretagne, pour que je découvre le nom de Noël Coypel », sourit Guillaume Kazerouni.

 

Manufacture des Gobelins, ateliers de Le Febvre d'Après Noël Coypel Le Triomphe de Minerve 1702-1707 Tapisserie de haute lisse en laine, soie et fils d'or Paris, Mobilier national, GMTT/5
Manufacture des Gobelins, ateliers de Le Febvre d'Après Noël Coypel Le Triomphe de Minerve 1702-1707 Tapisserie de haute lisse en laine, soie et fils d'or Paris, Mobilier national, GMTT/5 (© Paris, Mobilier national / Isabelle Bideau)

Trente ans jour pour jour après la tragédie, l’élève devenu expert ne peut dissimuler son plaisir de consacrer une rétrospective à celui qui décora jadis le plafond de la Grand’Chambre du célèbre monument rennais, miraculeusement épargné par l’incendie.

 

Avec Jacques Blanchard et Laurent de La Hyre, Noël Coypel fait partie des artistes du XVIIe siècle redécouverts grâce au travail du musée des Beaux-Arts de Rennes.

Guillaume Kazerouni, responsable des collections anciennes du musée des Beaux-Arts de Rennes.

Quand l’art fait tapisserie
 

Point d’orgue monumental de l’exposition montée en collaboration avec le domaine national des châteaux de Versailles et du Trianon, huit pièces tissées à la manufacture des Gobelins se déploient sur les murs du patio. Inspirées de modèles d’artistes italiens de la Renaissance tel que Raphaël, celles-ci auront demandé dix ans de travail au peintre du roi. Des travaux d’Hercule, et aussi de Bacchus, de Mars et de tous ces sujets bibliques ou mythologiques habitant ces décors à grotesque.

« La tapisserie a un lien avec le récit, c’est une technologie de l’image », commente Guillaume Kazerouni. Signe des temps, des QR code en tissu permettent aux visiteurs de profiter ici d’un dispositif de réalité augmentée.

 

Le Char de Jupiter entre la Justice et la Piété Vers 1671-1672 Huile sur toile Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, V.2012.1
Le Char de Jupiter entre la Justice et la Piété Vers 1671-1672 Huile sur toile Versailles, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, V.2012.1 (© Château de Versailles, Dist. RMN/ Christophe Fouin)

« La tapisserie, c’est l’objet d’art le plus cher de l’époque - on trouve dedans de l’or ou de la soie, et il faut alors un mois pour tisser un mètre carré - devenu un objet d’usage. »
 

Dans l’appart’ de Louis XIV
 

Du décor de la Grand’Chambre du parlement de Bretagne aux grandes commandes civiles (dont deux plafonds pour les Grands Appartements du château de Versailles), en passant par la peinture religieuse, le directeur des académies de Rome et de Paris va affirmer son art pendant plus de 60 ans. Noyau dur de l’exposition, trente tableaux réalisés pour les appartements privés de Louis XIV nous rappellent l’importance de la commande civile.

Les scènes des tableaux sont parfois très vivantes, un point de vue partagé par Guillaume Kazerouni : « on dirait un magasin de jouets avec tous ces visages poupons. » D’une étonnante modernité, également, avec ces couleurs particulièrement relevées.

 

La famille du peintre Vers 1690 Huile sur toile Suisse, collection particulière
La famille du peintre Vers 1690 Huile sur toile Suisse, collection particulière (JBG)

Peintre du Roi, Noël Coypel osera malgré tout l’impertinence, à l’image de ce tableau de famille dans lequel il réunira sa propre personne, sa première et deuxième femme, sans oublier sa fille. Une de ces 17 enfants, dont certains prolongerons par la suite sa renommée.

 

« Noël Coypel, peintre du roi », jusqu’au 5 mai, au musée des beaux-arts de Rennes

 

Jean-Baptiste Gandon

 

Colloque et livret FALC

Du plus accessible au plus scientifique et de l’histoire de l’art à la musique, le musée des beaux-arts a imaginé un panel de propositions originales.

  • Colloque : Noël Coypel et son temps, vendredi 1er mars.

  • Cycle de conférences : art et politique en France au temps du Roi Soleil (1660-1715)

  • Concerts : Le Banquet céleste (sam. 24 février, 17h) et « Éclats royaux » (lun. 6 mai, 20h, à l’opéra).

  • Ateliers : « La tapisserie en relief : entre technique et technologie » et « Le geste ancestral : initiation aux premiers gestes de tissage », par Lauriane Obry.

  • Visites : pour les tout-petits, mimées, flash, commentées ou avec un guide de l’office de tourisme.