La Criée centre d'art contemporain : sous le signe de la tortue

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Le ralentissement est au cœur du nouveau cycle de la Criée, "Festina lente" ou "Hâte-toi lentement"
Le ralentissement est au cœur du nouveau cycle de la Criée, "Festina lente" ou "Hâte-toi lentement" (Alias Sandi)

Vous courez après le temps et vous êtes sous pression ? Alors que la majorité des habitants de la planète partagent ce constat, la Criée - Centre d'art contemporain a décidé de prendre la tortue par la carapace avec un nouveau cycle triennal, « Festina lente », ou « Hâte-toi lentement ». Ne vous dépêchez-pas d'y aller, mais ne manquez pas le rendez-vous ! 

Ouverte en accès libre à tous les publics et située en plein centre ville, à deux pas des Halles centrales, la Criée – centre d’art contemporain est un lieu idéal pour s’évader et fuir les turpitudes urbaines. Chaque année, 35 000 personnes franchissent le seuil de ce lieu d’exposition, soient 130 curieux par jour. 

« Le visiteur type de la Criée est plutôt une femme, il est le plus souvent Bretillien et appartient à toutes les tranches d’âge, note Sophie Kaplan, la responsable des lieux. Il y a aussi une catégorie de visiteurs qui rentrent simplement parce qu’il passent par là. Je les appelle les flâneurs. »

En résidence à la Criée, Léa Muller invitera des artistes dans sa forêt pour réfléchir à la question de la regénération
En résidence à la Criée, Léa Muller invitera des artistes dans sa forêt pour réfléchir à la question de la regénération (Léa Muller)

La curiosité est un bien joli défaut, et le travail mené sur une signalétique – « plus colorée et plus visible » - devrait permettre d’améliorer encore l’identification de l’équipement.

« Il est urgent de ralentir »

Mais, même si l’art est un refuge pour l’esprit, la Criée ne reste pas imperméable aux grandes problématiques contemporaines. « Nous avons déjà ralenti le rythme des expositions, passées de 4 à 3 par an, en 2020. Avec le nouveau cycle Festina lente, programmé les trois prochaines années, nous rentrons littéralement dans le vif du sujet. »

« Festina lente », ou « Hâte-toi lentement ». Un oxymore à l’image du monde actuel pris dans l’étau de ses contradictions. « ‘Avaler les cyclones’, la première exposition d’Evariste Richter, est par exemple à la fois une réflexion sur le temps long de la géologie, le temps court des cyclones et de la foudre, sans oublier le temps de l’histoire. »

Intitulée Les Merveilles, la résidence de Gabrielle Manglou est programmée à l'école Jean Moulin en avril-juin 2024
Intitulée Les Merveilles, la résidence de Gabrielle Manglou est programmée à l'école Jean Moulin en avril-juin 2024 (David Desaleux)

« Respiro », le rendez-vous suivant avec la jeune artiste Anne-Charlotte Finel, nous emmène plus sur le terrain de l’environnement, avec notamment de drôles d’oiseaux prenant leur envol de l’aéroport d’Orly.

La tortue comme emblème

Si la Criée travaille sur le contenu des expositions, elle s’engage également sur le terrain de la recherche, avec l’édition prochaine d’une revue consacrée à ces problématiques (en mars et septembre 2024).

« Nous allons travailler sur une méthodologie qui prenne en compte les enjeux de sobriété, de ralentissement, et tout ce qui pourrait nous aider à retrouver un juste équilibre dans nos vies », conclut Sophie Kaplan. À l’image des pierres en suspension de Gabrielle Manglou, en résidence d’avril à juin 2024 à l’école Jean Moulin, celui-ci est pour le moins fragile. 

L’équipement artistique mène actuellement un diagnostic environnemental. Il est aussi le seul centre d’art français (avec le Palais de Tokyo) à effectuer un bilan carbone complet. « Nous nous servirons de ses enseignements pour construire la feuille de route la plus sobre et la plus décarbonée possible. »

La Criée est donc désormais sous le signe de la tortue, qui planera pendant trois ans sur le cycle « Festina Lente ». « La tortue à voile était le blason de l’Empereur Auguste… » Un stratège de guerre qui parle de ralentir, c’est très inspirant !

À découvrir en ce moment : «Avaler les cyclones », Evariste Richter. Jusqu’au 30 décembre, La Criée – centre d’art contemporain. Gratuit. Plus d'information sur le site de la Criée.

Jean-Baptiste Gandon