Espace des sciences : 40 ans de gai savoir

L’histoire de l’Espace des sciences n’a pas débuté aux Champs Libres mais au 1er étage d’un centre commercial. C’était au Colombia, à côté d’une bibliothèque municipale consacrée aux sciences. L’époque voit alors éclore les centres de culture scientifique, technique et industrielle (CCSTI) en région, inspirés par la Cité des sciences de la Villette. Les muséums et leurs collections à visiter ont vécu. Le public veut comprendre et participer.
À Rennes, l’implantation au Colombia n’allait pas de soi. Arrivé dans l’aventure en 1986 comme journaliste du futur magazine scientifique Sciences Ouest, Michel Cabaret se souvient : « Pour moi, il fallait être là où est le public »¹ . Deux ans plus tard, il en deviendra son directeur inamovible, toujours souriant et disponible. 

Petits moyens, grandes ambitions
 

Au début, l’aventure s’écrit à quatre seulement. La première exposition porte sur les savants bretons durant la Révolution. La seconde sur les roches et minéraux. « Rien de sexy mais ça marche ». Avec des moyens modestes mais beaucoup d’ingéniosité, l’Espace des sciences forge sa ligne de conduite. Diffuser la connaissance, susciter la curiosité…. « Dans les débats animés de la société, les enjeux scientifiques et techniques sont présents mais les citoyens se sentent incompétents et les scientifiques ont l’impression de ne pas être écoutés ». L’Espace des sciences développe une méthode : montrer la science en train de se faire, manipuler pour apprendre en s’amusant. 
 

Des moment forts
 

Les médiateurs ont du flair. « En 1992, nous fûmes parmi les tout premiers à organiser une expo sur le réchauffement climatique. On se demandait déjà si la vigne pousserait en Bretagne… ». L’Espace des sciences surfe sur l’actualité pour éclairer le grand public. « En 1999, nous avions invité les Rennais à venir observer l’éclipse solaire. Nous avions acheté des milliers de paires de lunettes de protection. Nous nous sommes retrouvés 12 000 au Thabor ! ». Plus tard, il y aura cette mystérieuse météorite tombée en forêt de Brocéliande. « Avec trois caméras, nous avions réussi à retracer sa trajectoire. Nous l’avions cherchée en vain ». 
 

N°1 sur YouTube
 

À l’étroit au centre commercial Colombia, l’Espace des sciences intègre les Champs Libres à son ouverture en 2006. Le déménagement vaut consécration du travail accompli, salué par 3 000 personnes le jour de l’inauguration. Plus d’espace, plus d’animations… L’Espace des sciences peut enfin développer ses activités.
Le planétarium numérique de 100 places fut l’un des tout premiers à proposer des séances en "temps réel". Plus d’une centaine d’expositions ont déjà été accueillies ainsi que plusieurs prix Nobel dont le climatologue Jean Jouzel, le physicien Alain Aspect, les chimistes Jean-Marie Lehn et Jean-Pierre Sauvage.
Aujourd’hui, le laboratoire de Merlin fait le bonheur des enfants. Les conférences hebdomadaires du mardi soir font carton plein. L’Espace des sciences coordonne la fête de la science. Ses expositions mobiles tournent aux quatre coins de la France. Forte de 200 000 abonnés, boostée par le confinement covid, sa chaîne YouTube constitue le premier canal francophone de vulgarisation scientifique. L’association emploie désormais cinquante salariés. 
 

D’utilité publique
 

Au fil du temps, l’Espace des sciences est devenu « une entreprise utilité publique » selon le physicien Etienne Klein, compagnon fidèle. Michel Cabaret valide : « La science est remise en question par les créationnistes, les climato-sceptiques, les complotistes et les intégristes de tout poil. Nous assistons à la confusion entre opinions et croyances. Plus que jamais nous devons promouvoir l’exercice d’une pensée rationnelle ». 
En juillet 2024, l’association poursuivra son œuvre à Morlaix en ouvrant un centre de médiation scientifique dans l’ancienne Manufacture des tabacs. 

[1] « Des étoiles plein les yeux – la fabuleuse histoire de l’Espace des sciences », Michel Cabaret, préface d’Etienne Klein, Ar Collection Editions, 20 €. 

Olivier Brovelli