Si ses vestiges ne payent pas de mine, l’exploitation de plomb de Pont-Péan est un gisement d’histoires racontant le passé industriel du territoire. Une épopée vertigineuse, entrecoupée de miracles et de catastrophes, de malédictions et de superstitions. Mais allumons notre lampe, car il est grand temps de plonger dans les entrailles de Rennes Métropole.
Existe-t-il un site plus profond que la mine de Pont-Péan sur le territoire de Rennes Métropole ? C’est peu probable. Nous nous trouvons ici à 600 mètres sous terre, la dernière étape avant l’enfer. Ceci explique peut-être pourquoi les mineurs prenaient le temps de consulter un lutin chaque année, la veille de la Sainte-Barbe. Et pourquoi on parlera de miracle en 1928, à la réouverture du site. Mais nous y reviendrons.
L’agenda indique l’an 1628 quand Jean de Chastelet, baron de Beausoleil et d’Auffembach et son épouse Martine de Bertereau font une découverte à proximité de la lande de Tellé. Les prospecteurs de minerais pour Henri IV signalent l’existence d’« une bonne mine de plomb, contenant de l’argent, du vitriol, du soufre, du zinc, du mercure, de l’arsenic. »
Le principal gisement de plomb du pays
On imagine très bien nos deux explorateurs portés en triomphe par la population locale, mais c’est l’inverse qui se produisit ! Accusé de charlatanisme, le couple sera au final emprisonné à vie. Le projet d’exploitation prend donc du plomb dans l’aile et il faut attendre 1730 pour que l’armateur malouin Noël Danycan de l’Épine, le fondateur de la Compagnie des mines de Bretagne, lance les travaux d’aménagement.
Les grandes manœuvres commencent alors : on détourne la Seiche pour l’éloigner de la mine et la technologie hydraulique utilisée, servira de référence aux articles consacrés aux pompes et au plomb dans l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.
L’exploitation du gisement est pourtant abandonnée pour des raisons principalement financières, dans les années 1790, avant de reprendre de plus belle en 1852. Une première machine à vapeur est commandée à la réouverture de trois anciens puits, prélude au nouvel essor de la mine qui va produire galène, blende et pyrite.
À la fin du XIXe siècle, l’entreprise est devenue le premier site extracteur de plomb argentifère du pays, fournissant à elle seule les quatre cinquièmes de la production nationale. Plus de 1 200 ouvriers travaillent dans une vingtaine de puits, dont le plus profond descend jusqu’à presque 600 mètres. On extrait à l’époque entre 600 et 700 tonnes de galène par an.
L’exploitation couvre alors 54 hectares et de nombreuses galeries déploient leurs tentacules sous les communes de Bruz et Saint-Erblon.
Las, les inondations et la crise du plomb ont raison de la mine, qui est noyée en 1904, laissant les mineurs sur le carreau.
Le faux miracle de 1928
Vous croyez aux miracles ? Il y aurait de quoi quand, en 1928, est annoncée la « résurrection » des mines de Pont-Péan. On annonce l’embauche de plus de 500 ouvriers, une vaste cité est construite en quelques mois pour les loger, l’eau des galeries est pompée pendant un an… Mais patatra ! La société repreneuse fait faillite en 1932, et c’est une véritable escroquerie qui est révélée au grand jour.
Au final, les mines auront fourni 200 000 tonnes de métal, dont les 9/10 en plomb, tout au long de leur existence. De quoi combler les industriels et les amateurs de magie noire, désireux de transformer le minerai en or. Mais vous ne croyez pas aux sorciers, pas plus que vous n’avaient foi dans les lutins.
Le millier d’employés des mines de Pont-Péan y croyaient quant à eux dur comme fer. Chaque année, la veille de la Sainte-Barbe, ces derniers laissaient brûler une chandelle pour savoir si ils mourraient dans l’année. Si la lumière s’éteignait avant que la bougie ne soit complètement consumée, c’est que la messe était dite…
Les vestiges du jour
Que reste-t-il de la mine de Pont-Péan ? Sa Tour Eiffel a disparu, ou du moins le chevalement métallique fabriqué en 1893 par l’entreprise du célèbre ingénieur. L’imposant bâtiment en briques rouges, construit en 1890, est toujours là, bien debout. Comme l’ancien vestiaire, transformé en chapelle, ou les maisons de mineurs, alignées comme les corons du Nord.
L’ancien immeuble de bureaux administratifs, protégé au titre des monuments historiques depuis 1985, fait aujourd’hui l’objet d’un projet de réaménagement (voir encadré).
Situés à l’entrée des galeries, les vestiges de puits nous racontent quant à eux l’histoire vertigineuse de l’une des plus grandes entreprises d’Ille-et-Vilaine.
La mine de Pont-Péan cherche des fonds !
En rachetant la mine en 1997, la mairie de Pont-Péan a clairement affiché sa volonté de « conserver l’identité du passé minier », pour en faire « un lieu culturel, associatif et patrimonial ». Un espace associatif dédié aux activités artistiques, une galerie patrimoniale et une médiathèque sont notamment prévus dans l’ancien immeuble de bureaux, qui sera par ailleurs doté d’une extension.
À ce jour, 2,6 millions d’euros de subventions ont déjà été collectés*, pour un coût global de 4,6 millions d’euros.
La commune soutient en parallèle l’appel aux dons lancé par la Fondation du patrimoine, avec un objectif de 50 000 euros à atteindre. Ce dernier est visible sur le site internet de la Fondation, et sous la forme d’un bulletin de dons disponible en mairie.
Enfin, si le plomb est très polluant, le respect des normes environnementales est une donnée fondamentale du projet de réhabilitation. Des efforts récompensés par le prix Impact environnemental 2022.
Plus d'informations sur le site de la Fondation du patrimoine.
* Fondation du patrimoine, du Département, de Rennes métropole, de l’État, de la Direction régionale des affaires culturelles et de l’agence de la transition écologique (Drac).
Dossier réalisé par Jean-Baptiste Gandon